Le patron de la Banque postale évoque les partenariats et rachats en cours ainsi que les nouvelles ambitions de l’établissement bancaire.
Stéphane Soumier : forcément, je dois vous demander si vous ne vivez pas un peu cette période avec un petit parfum de revanche ?
Patrick Werner :ce n’est pas notre état esprit la revanche. En revanche, si je puis dire, je ne vous cacherai pas que la réussite du parcours de la Banque postale est quelque chose qui nous satisfait vraiment, parce que c’est la notion de service et de service du client, qui est l’élément-clé.
Et de confiance quand même non ?
Oui, mais la confiance ça se mérite tous les jours. Ce n’est pas qu’une question de statut public ou non. Vous pouvez inspirer confiance, mais si vous ne donnez pas un bon service, vous n’aurez bientôt plus de Banque postale.
Je crois donc que c’est vraiment la réussite d’une stratégie que l’on a engagé depuis dix ans, la fidélité a ses racines et je pense aussi pouvoir dire que c’est l’absence d’erreurs et notamment l’absence d’erreurs dans la gestion de notre bilan. Chez nous, il y a eu zéro actif toxique, zéro Madoff.
Oui, mais vous n’y êtes pour rien ?
Bien sûr que si, nous avons 70 milliards placés sur les marchés. Nous avions au contraire beaucoup d’occasions de commettre des erreurs, ne serait-ce d’ailleurs qu’en allant chercher des rendements très flatteurs qui auraient fait du bien à notre résultat et nous n’avons pas voulu le faire.
Nous étions beaucoup plus exposés aux erreurs là-dessus que la plupart des banques françaises, de par le fait que le niveau, l’encours de nos ressources, des dépôts de nos clients, est très supérieur à ce que nous avons pu faire comme crédit jusqu’à présent, puisque nous n’avions pas la possibilité de le développer.
J’ai un chiffre là-dessus, quand vous disiez que la confiance n’est pas une question de statut. Le Revenu, qui est un baromètre, un mensuel financier qui fait autorité, a fait un sondage auprès des clients des banques. Vous devez le savoir, vous arrivez nettement en tête. Ce qui est étonnant et que vous ne savez peut-être pas, c’est que le dernier c’est peut-être l’établissement qui était censé le plus vous ressembler, c’est-à-dire les Caisses d’épargne. Je me disais que c’était peut-être pour vous quand même le chemin à ne pas prendre ?
Si vous voulez dire que le timing dans le développement -et notamment dans le développement par croissance externe ou par partenariat- est un élément absolument clé, que le bon réglage dutiming est un élément-clé dans le succès, je pense pouvoir dire que, en tout cas pour nous, ça a été effectivement le cas.
C’est une chose à laquelle je veille de manière très précise. C’est-à-dire qu’il faut aller aussi vite que possible, mais le possible c’est ce qu’on est capable de maîtriser. Tout le monde pense aux sujets financiers, la réalité c’est quand même très souvent plutôt un sujet humain.
C’est-à-dire ?
Une équipe de direction et des équipes en général font bien une seule chose ou deux choses à la fois. Il y a un proverbe populaire qui dit « qui trop embrasse mal étreint » et nous essayons de bien embrasser.
Vous allez embrasser du monde, si je peux me permettre… Vous lancez l’activité crédit à la consommation avec la Société générale, de coût entreprise avec Groupama pour de l’assurance et vous négociez le rachat de Tocqueville Finance, là on va directement sur les marchés. Ça veut dire que c’est le bon timing pour prendre une nouvelle dimension ?
Nous le pensons. Prenons l’exemple du crédit à la consommation : quand nous avons eu l’autorisation de le faire, j’ai dit qu’il nous faudrait deux ans pour être sur le marché sdu crédit à la consommation, parce que je sais que ça demande un travail absolument considérable. Ce ne sont pas des choses que nous avons cueillies comme ça toutes ensemble.
Donc ce n’est pas l’heure de la revanche, c’est l’heure de la récolte alors ?
Nous avons récolté, mais si votre question est de savoir si on va encore plus récolter à l’avenir, c’est ma conviction absolue.
J’ai quand même une question sur Tocqueville Finance, parce que là on est vraiment sur les marchés, sur même ce qu’il y a de plus dynamique et donc de plus dangereux sur les marchés. Vous voulez élargir votre clientèle ?
C’est un objectif tout à fait majeur. La Banque postale a un objectif stratégique qui est à la fin 2010, d’atteindre 10 millions de clients actifs ou de clients de banque principale.
Dans toutes les couches de la société et toutes les couches de patrimoine ?
Exactement, c’est déjà le cas vous savez. Nous avons une clientèle patrimoniale tout à fait importante à la Banque postale, mais je vous concède volontiers que ce n’est pas l’image qui était la nôtre jusqu’à présent. Et d’ailleurs, le rachat de Tocqueville Finance peut être un élément aussi intéressant pour dire aux marchés, aux Français, que nous avons tous les niveaux de prestations bancaires.
Et vous gagnez de l’argent sur la gestion d’actifs. Sur vos résultats semestriels, vous collectez sur la gestion d’actifs des sommes qui sont importantes, plus de quatre milliards d’euros, c’est ça ?
Oui c’est ça. Mais beaucoup d’ailleurs sur un segment qui n’était pas majeur pour nous jusqu’à présent, qui sont les entreprises et institutionnels, qui ont, je crois, découvert la Banque postale.
Pour conclure, Médiamétrie nous dit que quand on cherche des informations sur les produits bancaires, c’est le site de la Banque postale qui est le plus consulté par les internautes, devant toutes les banques.
Je suis ravi d’entendre ça.
Cela fait partie de ces signes qui montrent que vous avez une place particulière…
Oui, c’est certain, nous avons une place tout à fait particulière. J’ai l’habitude de dire qu’il est clair, maintenant que nous sommes une banque unique et très singulière sur le marché français. Et qu’incontestablement la crise a braqué sur nous un spot assez serré, dont on se réjouit évidemment beaucoup.